C'était surréaliste. Une brume intense l'empêchait de voir à dix pas en avant d'elle. Il fallait sérieusement réduire la vitesse... Les phares de l'auto n'éclairaient plus qu'un mur de vapeurs mouvantes. Elle se demandait si un camion fou, conduit par un imbécile, n'allait pas surgir et foncer sur sa voiture...
Elle suait abondamment. Toute cette humidité ! Dans l'après-midi, son médecin de famille l'avait chicanée en observant l'enflure de ses jambes: "C'est dangereux, votre excès pondéral !" ... Pourquoi ces formules enfarinées ? Elle le savait qu'elle était trop grosse. Ses tantes parlaient d'elle en disant: la nièce corpulente... À la petite école, c'était plus méchant: les enfants la traitait de " grosse bakaisse". Elle s'épongea le cou avec un mouchoir déjà trempé de sueur.
Ouf ! Il était temps: elle arrivait. Le vieil immeuble venait de surgir sur sa droite, comme un bateau-fantôme. Elle gara l'auto, coupa le moteur, retira la clé du contact et glissa le trousseau dans sa sacoche noire. Assise derrière le volant, à la noirceur, elle ne bougea pas.
C'était comme un cri. Ou bien, comme une sonnerie de téléphone. Il n'y avait eu ni cri ni sonnerie, mais l'intuition l'avait traversée comme une décharge d'électricité. L'intuition de tout laisser tomber pendant qu'il était encore temps. Il fallait remettre l'auto en marche, refaire le chemin à l'envers. Elle eut très chaud, se mit à suer.
Son imbécile de mari avait tout gâché, mais c'était prévisible: c'était son erreur à elle, de lui avoir confié toute l'opération. Maintenant elle était venue pour reprendre les choses en main...
l'intuition s'était évaporée. " Tant pis, j'y vais ." Barbe s'extirpa difficilement de l'auto. Les jambes fatiguées, elle traversa le stationnement et gagna l'entrée de l'édifice.
Elle suait abondamment. Toute cette humidité ! Dans l'après-midi, son médecin de famille l'avait chicanée en observant l'enflure de ses jambes: "C'est dangereux, votre excès pondéral !" ... Pourquoi ces formules enfarinées ? Elle le savait qu'elle était trop grosse. Ses tantes parlaient d'elle en disant: la nièce corpulente... À la petite école, c'était plus méchant: les enfants la traitait de " grosse bakaisse". Elle s'épongea le cou avec un mouchoir déjà trempé de sueur.
Ouf ! Il était temps: elle arrivait. Le vieil immeuble venait de surgir sur sa droite, comme un bateau-fantôme. Elle gara l'auto, coupa le moteur, retira la clé du contact et glissa le trousseau dans sa sacoche noire. Assise derrière le volant, à la noirceur, elle ne bougea pas.
C'était comme un cri. Ou bien, comme une sonnerie de téléphone. Il n'y avait eu ni cri ni sonnerie, mais l'intuition l'avait traversée comme une décharge d'électricité. L'intuition de tout laisser tomber pendant qu'il était encore temps. Il fallait remettre l'auto en marche, refaire le chemin à l'envers. Elle eut très chaud, se mit à suer.
Son imbécile de mari avait tout gâché, mais c'était prévisible: c'était son erreur à elle, de lui avoir confié toute l'opération. Maintenant elle était venue pour reprendre les choses en main...
l'intuition s'était évaporée. " Tant pis, j'y vais ." Barbe s'extirpa difficilement de l'auto. Les jambes fatiguées, elle traversa le stationnement et gagna l'entrée de l'édifice.